Il est impensable pour chacun d'entre nous de ne pas disposer de WC dans son habitation !
Il
faut savoir qu'à Ouveillan, avant 1939, il n'y avait pas de système
d'assainissement. Pour ceux qui n'avaient pas la cabane au fond du
jardin, notamment ceux qui habitaient dans le centre du village,
c'est le seau hygiénique qui était utilisé pour faire ses besoins.
Charge aux femmes d'évacuer chaque jour le contenu. Certaines
allaient vider aux alentours du village mais d'autres vidaient
carrément dans la rue.
La
municipalité d'Ouveillan s'est donc préoccupée de ce problème et
a mis en place un système de WC publics et d'urinoirs dont le projet
date du 20 janvier 1939. Nous avons retrouvé, aux Archives
départementales de l'Aude (2 Op2243), les documents ainsi que les
plans et les élévations relatifs à ce projet d'assainissement
général du village, notamment le lot W.C., Urinoirs et Vidoirs.
Le
mémoire descriptif du projet établi par
l'architecte Henry
Gibert,
indique que "la commune d'Ouveillan ne possède aucun WC. Les
habitants jettent le seau hygiénique aux abords du village et même
dans les caniveaux des rues". Imaginez l'odeur en été avec des
chaleurs comme cet été !
En
1939, Ouveillan compte 2200 habitants, dont 290 habitent dans les
campagnes environnantes et 280 enfants utilisent les WC des écoles.
La
commission municipale a donc "minutieusement choisi" les
points d'installation des WC publics. Au départ, elle avait
prévu des WC avec fosses septiques mais "devant la dépense
trop importante à engager et le manque de terrain pour construire
ces fosses", le conseil municipal désireux d'améliorer la
propreté du village a demandé à l'architecte Henry Gibert, des WC
et des urinoirs avec déversement dans des fosses étanches en béton
de ciment armé.
Pour
l'avant-projet avec les fosses septiques, la Société Standard de
Marseille estimait le montant des travaux à 591 800 francs «non
compris l'amenée d'eau et le machefer des préfiltres ».
Toutefois, la dimension de ces fosses de 7 m X 7 m rendait leur
réalisation impossible dans le village.
Henri
Gibert, opte donc pour la solution avec déversement dont le montant
des travaux est estimé à 310726,15 francs auxquels il faut
ajouter les honoraires de l'architecte 21750,83 francs et les
acquisitions foncières pour 4418,21 francs. Le montant total estimé
des travaux est de 336895, 19 francs.
- Un WC sera installé dans le jardin de la mairie(emplacement n°1). La mairie est alors située au chevet de l'église, à l'entrée de l'actuel jardin public. Ce WC est destiné au personnel de la mairie (secrétaire, secrétaire-adjoint, gardes...). Il comprend une fosse de 15 m3 avec "cuvette à la turque à effet d'eau par pédales, afin de ne pas emplir la fosse d'eau trop rapidement".
- Les urinoirs du boulevard Robespierre (emplacement n°2). Il y avait déjà "un groupe de 3 urinoirs très anciens avec plaques détériorées et écran protecteur en tôle, rongé par la rouille"! Ces urinoirs se déversaient dans le caniveau du boulevard et l'urine descendait une partie du boulevard pour rejoindre l'égout souterrain en bas de la pente. Le projet prévoit donc 5 urinoirs en ardoise et l'urine est canalisée dans un tuyau en grès placé sous la chaussée et qui va rejoindre l'égout couvert déjà existant.
- Les urinoirs de la place Rouquié (emplacement n°3). Le projet indique que "depuis fort longtemps, les hommes vont uriner contre tous les murs libres de la place et cela d'autant plus souvent et d'autant plus facilement qu'un grand café s'ouvre sur cette place" ! (sic). Pour remédier à cette situation, notée comme anormale par l'architecte (on s'en douterai à moins), il est prévu un groupe d'urinoirs comportant 3 stalles sur un emplacement communal situé en retrait de la place Rouquié. L'urine est canalisée par un tuyau en grès placé sous la rue Espagnac, va rejoindre l'égout souterrain du Boulevard Robespierre, puis la fosse étanche construite sur le chemin de la distillerie.
- Les WC de la Distillerie (emplacement n°4). Le projet précise que "les gens vont jeter les seaux hygiéniques tout près des bâtiments de la distillerie-coopérative". Il est donc prévu, à proximité de celle-ci des "water-closets" hommes et femmes et un vidoir. Les cuvettes seront nettoyés à l'aide de chasses individuelles de 12 litres de débit et le vidoir, d'une chasse de 30 litres. Les effluents de ces WC allant rejoindre la grande fosse étanche située sur le chemin de la distillerie.
- Les WC de la cave coopérative (emplacement n°5). Il est indiqué que dans ce quartier, "les gens sont dans l'obligation, faute de WC, de déverser les matières dans le ruisseau d'écoulement couvert qui se dirige vers la plaine". Il est donc prévu la construction d'un groupe de WC avec fosse étanche de 63 m3. La contenance de la fosse est conçue pour 350 usagers. Cette contenance exigera une vidange tous les 3 mois. Le fossé latéral des WC sera cimenté sur une longueur de 53 m afin que son lit et ses parois soient toujours en état de propreté.
- Les WC « Jardin Mas » (emplacement n°6) sont installés à un endroit où les gens vont vider leurs récipients dont le contenu se répand dans les ruisseaux et les fossés. Il est prévu 2 WC pour hommes, 1 WC pour femmes et un vidoir. Finalement, ces WC ont été installés au bas de la Rue du Parc.
- Les WC « Lavoirs », (emplacement n°7) c'est le même type d'installation qui est proposée. Les WC seront finalement installés au bas de la Rue du Parc où ils subsistent encore mais ne fonctionnent plus.
- La grande fosse étanche de la distillerie avait été prévue pour une contenance de 250 m3 pour une utilisation des WC par 1280 personnes. La ventilation de la fosse sera assurée par 2 tuyaux d'« Eternit »
Pour
ces travaux, la commune demande qu'il soit procédé à une
adjudication restreinte entre les entrepreneurs et maçons du
village, pour éviter le chômage, conséquence des fortes gelées de
mars, avril et mai 1938.
Nous
n'avons pas trouvé de documents quand à la réalisation des
travaux.
Aujourd'hui,
les WC et urinoirs publics ont pour la plupart disparu. Il
reste uniquement le bâtiment des WC situé au bas de la Rue du
Parc et celui de rue du Prat.
Qui
est cet architecte qui travaille sur le projet des WC d'Ouveillan ?
Henry
Gibert (1895-1951)
est né à Luc-sur-Orbieu. Il s'installe dans un premier temps à
Perpignan où il habite jusqu'en 1921, puis s'installe à Narbonne où
il se trouve en 1924. Il va être un des architecte des caves
coopératives de l'Aude avec notamment les caves de Camplong en 1932,
d'Argeliers et de Luc-sur-Orbieu en 1933, de Cuxac d'Aude, de
Montredon-des-Corbières en 1939, de Gruissan en 1948 et de
Roquefort-des-Corbières en 1949.
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